Comment jouer aux p’tits cuistots dans la médina de Fès

Me voici de retour avec un nouveau post qui va solliciter la vue, le goût et l’odorat. Il faut croire que le petit tour des Fès-El-Bali sur le pouce ne m’a pas rassasiée. Bien au contraire, mon appétit n’a fait que s’accroître ! Et pour compléter ma visite de la vieille médina de Fès, j’ai poussé ma gourmandise encore un peu plus loin en participant à des cours de cuisine traditionnelle au cœur de la belle médina.

J’aime les traditions, et le Maroc en regorge. Pour ma première visite, j’ai voulu me pencher sur son aspect « fourneaux » puisque cela me démangeait sérieusement de mettre la main à la pâte. Comme je vous disais dans un de mes billets précédents, le Maroc m’a rapproché géographiquement mais aussi très affectivement de l’Espagne. Chez nous, l’acte quotidien de s’attabler est revêtu d’une importance toute particulière. Manger n’est plus un besoin physiologique, c’est un rituel presque sacré. Ceux qui sont familiers avec l’art de vivre à l’espagnole, savent qu’avaler son repas (même au bureau !) en cinq minutes devant son PC, ou en déambulant devant les vitrines (comme le fait le parisien), relève du blasphème. C’est sûrement pour cela que nos voisins européens ont le poil hérissé rien qu’à l’idée de participer à un repas d’affaires en sol espagnol ! Quatre heures à table, j’en connais qui en sont restés marqués à vie.

On dit dans mon pays que la cuisine rapproche les peuples. On aime les vérités universelles, nous ;-). Attention alors… car je vais continuer à parler ici de spécialités marocaines. Avant de cliquer sur « lire la suite », veillez à bien vous remplir le ventre, car ce dernier billet risque de vous mettre l’eau à la bouche.

Début juin, le Maroc bouclait les derniers préparatifs pour le Ramadan. J’étais dépitée en partant. Non parce que les vacances étaient finies, mais parce que j’allais rater tous ces repas princiers, toutes ces spécialités gourmandes dont j’avais aperçu les menus déjà annoncés pour l’iftar (rupture du jeûne). Néanmoins lorsque je me suis remémorée les heures passées dans la cuisine de Samira, le sourire est revenu. J’allais pouvoir préparer tous ces bons petits plats soigneusement consignés dans mes carnets, plus d’autres spécialités marocaines comme celles du bouquin de cuisine que j’ai ramené (oui, je me suis encore payé un bouquin de recettes !).

En faisant mes recherches pour prendre des cours de cuisine marocaine, j’ai contacté plusieurs organismes proposant des formules similaires : petit tour au marché pour les courses, préparation en cuisine et dégustation sur place. Toutes ses propositions étaient très alléchantes. Cependant le choix de le faire dans l’intimité d’un riad m’a semblé plus en accord avec mon idée de simplicité et d’hospitalité. Je me suis aussi imaginé que cela aurait l’avantage de réduire le nombre participants à l’atelier, car les cuisines des riads offrent une surface de travail, et donc une capacité d’accueil, assez réduite. C’est ainsi qu’avec beaucoup de hasard et un petit coup de main de la part de Google, je suis tombée sur le Riad Anata qui propose des cours de cuisine pour ses hôtes. Ne faisant pas partie de cette catégorie, j’ai quand même entrepris de les contacter à la dernière minute et tenter ma chance. A ma grande réjouissance, le retour a été positif et nous nous sommes lancés dans la préparation d’un menu très complet, et typiquement marocain.

Le jour J, au Riad Anata,  nous avions rendez-vous avec Samira, la fée des fourneaux. Dès qu’elle a pu se libérer, nous avons discuté les possibilités de menu à confectionner, en se laissant conseiller sur les meilleurs ingrédients de saison, et la fraîcheur de telle ou telle viande vendue auprès des bouchers de la médina. Ensuite, il est venu l’heure de faire un petit tour au marché avec Samira pour commander les denrées qui seraient livrées directement au Riad, avant même qu’on soit de retour.

Comme j’avais bien repéré le souk aux légumes au cours de nos balades dans la médina, j’ai essayé de composer avec les produits que j’avais déjà en tête, avec une préférence pour les saveurs d’orange et d’artichaut. Nous avons ainsi décidé le menu suivant :

  • Soupe de betterave (je l’ai faite à la maison plusieurs fois depuis)
  • Salade tiède de carottes
  • Salade froide d’aubergines
  • Tajine de bœuf aux courgettes et artichauts (l’agneau tournait de l’œil…)
  • Crème de lait aux oranges et à la fleur d’oranger

Il paraît qu’un menu marocain complet se compose de quelques entrées froides ou chaudes, ou petites salades (comme les mezze), suivi d’un plat principal (coucous ou tajine principalement) et d’un dessert. Le thé à la menthe en fin de repas devrait aider à faire descendre le tout, mais quand je pense à la quantité de sucre qu’on y met… j’ai des doutes. Personnellement, j’apprécie mieux le thé quand il se tient à distance des repas.

De retour au Riad, dans sa cuisine exigüe située sur la terrasse, nos avons enchaîné les mouvements et taché de suivre le rythme marqué par Samira pendant plus de 3h ! Pour moi, ça n’a pas été évident. A vouloir tout faire en même temps, j’ai sûrement perdu le fil à plusieurs reprises. Dans une main mon appareil photo, dans l’autre le stylo et le carnet de notes pour ne pas en perdre une miette… mais vouloir en plus, presser les oranges et découper le persil, impossible ! Je me suis vite laissé déborder, en passant le relais à Mr Expat qui a donné un sacré coup de main à Samira. C’était extraordinaire de voir cette figure attachante et débonnaire préparer 4 plats à l’unisson. Une vraie femme orchestre. Pari tenu, pari gagné !

Collés aux fourneaux, en quelques heures, nous avons confectionné à six mains le menu du dîner du Riad Anata. Ce n’est pas un privilège, ça ? Le Chef c’est nous ! 😉

Comme les cours se déroulent à partir de 11h, nous avons été rattrapés par le temps (que nous n’avons pas vu passer, d’ailleurs !). Il n’était donc plus une heure raisonnable pour déguster le repas sur place. En revanche, on nous a proposé d’y revenir pour le dîner. Malgré l’absence de Samira, qui avait bien mérité son repos, l’idée n’était pas plus mal puisque tout ce qui nous restait à faire était d’attendre confortablement à ce qu’on nous apporte le repas à table.

Au moment de ma visite à Fès le Ramadan n’avais pas encore commencé mais nous nous situions à 5 jours à peine du coup d’envoi. Ce n’était pas si grave finalement, car ce repas dans l’intimité de la terrasse du Riad Anata nous a semblé déjà tout à fait « ramadanesque ». Qu’est-ce qu’on dit déjà ?…  Bismillah, et bonne dégustation!

Un grand merci à Samira pour sa simplicité, sa convivialité et l’envie de partager son savoir faire avec les visiteurs de passage comme nous. Tout le monde n’est pas capable de réunir patience, connaissance et bienveillance. Les deux apprentis cuistots que nous sommes, avons énormément apprécié le contact, le tour au marché, les anecdotes,  et le petit arrêt dégustation à l’échoppe de b’sara (soupe aux fèves vendue dans la médina). Une petite pensée à Valérie également, pour son accueil (encore une non-marocaine sous le charme de Fès !) et pour son petit geste convivial qui a très bien su rehausser les saveurs de la soirée.

Si le sujet culinaire vous branche autant que moi, nombreux sont les riads qui proposent ce type d’activité à leurs hôtes. N’hésitez pas à demander directement aux gérants car certains n’en font pas forcément la publicité.

En général, les cours de cuisine les plus abordables dans la médina se situent autour de 300/600 Dirhams  (30 à 60 €) par personne. J’en ai vu de bien plus chers sans trop comprendre pourquoi. Est-ce la renommée du chef, la gamme que l’établissement veut se donner, le coût des ingrédients ou l’inventivité de la cuisine ? Si j’ai l’occasion de revenir à Fès, soyez-en sûrs, je vous en dirai un peu plus.

Chers amis, tout ce bavardage et ces tortures pour gastrolâtres dans le seul but de vous avouer que j’ai du mal à ne pas penser à la nourriture lorsque je voyage. Plus le dépaysement est intense, plus j’ai faim !

Et vous alors, quelle place accordez-vous à la « gourmandise » dans vos escapades ?!

11 commentaires sur « A Fès, le Chef c’est moi ! »

  1. Je sors de table mais ton escapade gourmande m’a chatouillé les papilles ! Je suis comme toi : manger c’est sacré, et j’avoue, où que je sois, les repas, ce sont les moments que j’attends toujours avec impatience 🙂
    Et quand je fais du tourisme, ça tourne principalement autour de la gastronomie locale !

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    1. Alors, tentée par Fès Lucie? Moi, je conseille vivement le séjour dans la médina mais cette adresse est surtout parfaite pour visiter Fès avec les papilles 😉

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    1. T’aimes pas les fourneaux? Pas grave du tout, à ma table j’ai surtout besoin de bons convives. Dommage, j’avais oublié la distance Kenya-Chine…

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  2. Hummm! Je sors tout juste d’un restaurant japonais mais ca me fait tout de meme drolement envie! Quelle convivialite! Quelles couleurs!… Ne me manquent que les delicieuses odeurs epicees que j’arrive presque a m’imaginer! Merci pour cet article si vivant!

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