Lewa Wildlife Conservancy, le safari comme vous l’avez toujours rêvé.

Ça vous est déjà arrivé de voir les images de tel ou tel endroit et d’en devenir obsédés tellement vous mourez d’envie d’y aller? Ce fut pour moi le cas avec la Lewa Wildlife conservancy pendant nos trois derniers mois d’itinérance au Kenya. A force de visionner des photos pro et des documentaires animaliers ayant été tournés à Lewa, j’ai succombé à ses avances. C’est ce qu’on appelle mettre en pratique un marketing réussi, et moi, s’agissant d’animaux, je reste une proie facile.

Lewa Wildlife Conservancy est située à l’entrée de la région connue sous le nom du Plateau de Laikipia, voisin proche du Mount Kenya. Du temps de la colonisation, cette ancienne zone constituée de ranchs privés fut le terrain de jeu favori des éleveurs européens qui au nom de leur bétail décimèrent tous les animaux résidents, ou presque. Aujourd’hui, ironie du sort, ces ranchs s’attachent plus que jamais à la protection de la faune sauvage au Kenya. Pour vous dresser le portrait actuel, de nombreuses concessions privées, les unes plus exclusives que les autres, peuplent la région de Laikipia et se disputent un tourisme d’élite qui vise à réduire l’impact environnemental et à bénéficier directement aux communautés locales. Une préoccupation tout à fait dans l’air du temps.

Outre sa forte médiatisation, où réside-t-il l’attrait de Lewa ?  Est-ce  un endroit fascinant à ce point ? Il ne faut pas me demander, dans ce billet je ne vais pas rester objective 😉 .

Depuis notre première expérience de safari en self-drive, nous avons adopté la formule et nous nous sommes lancés à la découverte d’autres régions du Kenya, toujours au volant de notre voiture (vieille mais courageuse!). L’étendue qui s’aplatit au nord de l’équateur est très différente des plaines du Mara. Puis, plus on monte en latitude, plus les paysages gagnent en aridité. Cette région complètement dépourvue de hautes montagnes, à l’exception du Mont Kenya, deuxième plus haut sommet d’Afrique qui veille de loin sur la plaine, prend des airs de champ de blé. Un champ de blé sans fin. Et à Lewa plus qu’ailleurs, on retrouve une palette d’ocres inégalable.

vue-sur-mount-kenya

L’herbe est très haute au mois d’octobre, il est donc difficile de repérer les animaux lors d’une sortie photo. Déjà qu’ils ont la faculté de se fondre dans n’importe quel paysage, les lions se font ici un énorme plaisir à rester tapis dans une végétation dont ils épousent parfaitement les tonalités. Un gros avantage : nous sommes dans une propriété privée, ce qui accorde aux voitures de safari (strictement celles de la réserve) le droit de sortir des chemins balisés pour traquer les fauves.

D’autres fois, au contraire, le champ de blé semble avoir été ratiboisé. Le rouge de la terre s’obscurcit progressivement. Quant à la poussière, malheureusement pour nos appareils photo, elle est toujours de la partie. Des centaines de carcasses d’arbres à l’expression tourmentée envahissent les bas côtés. Ils semblent souffrir le martyre. Tous ces acacias squelettiques m’évoquent de drôle d’images : j’hésite entre des morts qui se contorsionnent pour sortir de terre ou la scène de nos vignes rachitiques en plein cœur de l’hiver espagnol. Au moment du crépuscule, ça vous fait dresser le poil !

Partout, le paysage a soif. Ça saute aux yeux. Nous parcourons la réserve de fond en comble pour constater qu’à peine quelques touffes vertes trahissent la présence des cours d’eau. On ne peut pas se tromper, c’est là que les herbivores et les oiseaux nous donnent toujours rendez-vous.

rendez-vous-au-point-deau-lewa

On observera (très) souvent des routes ou des chemins qui traversent mes images. C’est fait exprès, c’est une psychose qui caractérise ma prise de photo paysage. Je crois que c’est une façon inconsciente de me laisser le moyen de revenir dans ces paysages. Je garde l’espoir qu’il suffise un jour de suivre ces lignes qui me pointent le chemin pour me retrouver à nouveau dans les plus beaux endroits que j’ai connus. En Afrique ou ailleurs, cela me rassure de savoir que je pourrais y retourner à tout moment 😉 .

De toute évidence, au nord de l’équateur la profusion d’animaux n’est pas celle que nous avons trouvée dans le sud mais l’alchimie des paysages me semble raison suffisante pour se déplacer jusqu’ici. Malgré le privilège d’avoir rencontré les Big 5 (éléphant, lion, rhinocéros, buffle, léopard), deux fois dans une même journée (Whouhaou!), je dois m’avouer que Lewa est presque plus jolie pour ses paysages que pour sa faune.

champs-de-bleAprès quatre jours dans la réserve, j’ai fini par trouver le coupable. Lewa est le modèle tout craché d’un safari de catalogue, et c’est sans doute mon inconscient façonné par les médias et les photographes animaliers qui m’a poussé à la désirer si ardemment.  Tels sont les paysages diffusés par les médias, l’image d’une famille d’éléphants qui traverse pénarde les vastes étendues arides, les troupeaux de zèbres dont les rayures vous donnent le vertige, les lions qui se prélassent dans un champ de blé mûr.

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A l’instar d’autres réserves privées, Lewa est un sanctuaire à but non lucratif qui reverse ses bénéfices sur des projets communautaires ou de protection de la faune vivant dans ses frontières et au delà. C’est à Lewa que l’esprit de protection est né et s’est ensuite répandu dans toute la région de Laikipia. Elle reste un modèle en matière de sauvegarde des espèces, d’intégration et d’éducation des communautés indigènes.  Le rhinocéros, aussi menacé par le braconnage que l’éléphant, est à Lewa une vraie star qui s’épanouit à merveille. Il est au petits oignons, la quantité de rangers qui surveillent et répertorient la bête au quotidien est supérieur à la population de rhinos elle même ! Une autre réussite en matière de sauvegarde de la faune : le zèbre de Grevy (trapu et sans rayures sur le ventre), cette beauté que l’on retrouve seulement au nord de l’équateur. Leur densité de population dans la réserve est considérée comme l’une de plus importantes au monde.

Allez, je vous mets une petite batterie de portraits de résidents!

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leopard-tapis-dans-le-champ-de-ble

la-famille-de-zebres-au-complet

rhinos-face-au-mont-kenya

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J’ai été comblée en matière de safari mais comme rien n’est parfait, je suis repartie avec une petite insatisfaction, celle de ne pas rencontrer les wild dogs malgré les avoir suivis de très très près. Les chiens sauvages ou lycaons, plus trop nombreux de nos jours, sont bien plus farouches que le léopard !

Les amateurs de la savane kenyane auront forcément entendu parler du Marathon de Lewa. C’est un événement sportif à portée internationale (presque plus médiatisé que les violences électorales) qui attire chaque année des milliers de coureurs amateurs et professionnels (plus de 1200 inscrits en 2016). La vraie difficulté ici : courir en altitude, et pour cela les athlètes kenyans sont imbattables !  Aussi saugrenu que cela puisse paraître, la course traverse la réserve naturelle truffée d’animaux sauvages. Pour réussir une telle lubie (y a-t-il un autre qualificatif ?), on doit chaque année faire appel à une quantité démesurée d’hélicoptères et de patrouilles afin de tenir la faune éloignée du parcours de course. Cette extravagance atteignait cette année son paroxysme lorsqu’un rhinocéros a stationné en plein milieu du parcours et que l’on a dû freiner les coureurs en attendant que la bête se décide à finir la traversée. Les efforts d’imagination déployés par l’être humain pour s’attirer des émotions fortes n’en finira jamais de m’étonner.

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Crédit photo: Martin Nyakabete

Aurais-je dressé un portrait trop parfait de Lewa ? Je me laisse souvent porter par mon enthousiasme débordant,  mais à vous d’en juger… j’ai déjà introduit pas mal d’éléments de comparaison dans ce blog, non ? 😉

Petit aparté utile au touriste indépendant

Dans le même style de safari haut-de-gamme, déco chic ou logement tiré du classement du Condé Nast Traveler, il existe d’autres concessions privées dans la région de Laikipia; parmi lesquelles on compte le Segera Ranch, le Solio Ranch (le rhinocéros est la star !) et la Borana Conservancy. Mais aussi Il Ngwesi Group Ranch, exceptionnellement géré par une communauté masaï (Allez-y!). Et puis l’archiconnue Ol Pejeta Conservancy, la plus abordable de toutes, qui à mon goût se rapproche plus du parc d’attractions que de la réserve animalière, mais on peut y faire du self-drive.

Le tourisme qui atterri au Plateau de Laikipia n’est pas tout à fait celui qui fréquente le Masaï Mara ou le parc d’Amboseli, les visiteurs de mon espèce constituent une petite minorité et cela n’est pas de l’ordre du hasard. Toutes ces concessions privées pratiquent les mêmes prix indécents et visent un tourisme international de « package », exigeant et très à l’aise dans son budget de vacances. A noter aussi que ces magnifiques réserves naturelles ne sont accessibles qu’aux occupants des lodges de safari. La visite à la journée, c’est niet ! Il faut passer la nuit sur place. Alors il vaut mieux savoir où l’on met les pieds avant de se fâcher avec son tour-opérateur.

L’année dernière, après plusieurs tentatives de réservation dans le logement que je convoitais, j’ai enfin réussi à obtenir une chambre hors de la grosse période d’affluence du tourisme international. Les résidents (ou expatriés) nous demandons toujours à profiter de l’avantage lié à notre statut, à savoir une importante remise sur les prix de logement (par rapport à ceux réclamés habituellement aux tour-opérateurs). C’est grâce à ce coup de pouce providentiel que les résidents comme moi peuvent encore voyager raisonnablement dans un pays comme le Kenya. Un bel exemple, ce blog ;-).  L’hôtellerie de safari est assez lucide à ce sujet. Un logement qui refuse de pratiquer le tarif « résident » hors saison tourne à vide pendant une partie de l’année car le tourisme de safari au Kenya, sur le long terme, est inabordable. Tout ceci étant dit, séjourner dans une conservancy du Plateau de Laikipia reste quand même la quintessence d’un safari au Kenya. Alors si vous deviez vous accorder des vacances voluptueuses, Laikipia c’est de la pure débauche !

A noter que les concessions privées demandent également une taxe de séjour (par personne et par jour) qui peut parfois être plus élevée que celle demandée par les parcs nationaux.

8 commentaires sur « Lewa, j’en crève d’envie! »

  1. En ce moment la situation est confuse sur le plateau de Laikipia, avec la sécheresse la région connait un invasion d’éleveurs avec leur bétail, ils détruisent tout. Lewa n’est pas trop touché jusqu’à maintenant mais les installations touristiques du ranch de Mugie plus à l’Ouest ont complètement cramé. Un séjour dans le Segera Reatreat de Jorgen Zeitz ça doit être MERVEILLEUX !!

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    1. Tu sembles bien connaître le Plateau. Dans cette région du pays, en tout cas à l’ouest et nord du Mont Kenya, la sécheresse m’a semblé endémique, j’y étais fin octobre et ils attendaient les pluies désespérément. Lors de ce même voyage, j’ai poussé plus loin jusqu’à Meru et je me souviens qu’à Samburu la rivière était un filet d’eau invisible. Malgré l’interdiction, les bergers emmenaient en cachette leur bétail dans le parc où quelques poussées de végétation verte subsistaient encore. Oui, l’eau est plus recherchée que le pétrole ici, n’est-ce pas? Je ne connais pas le Segera autre que par des photos et sa réputation, mais à Lewa, quoique l’exclusivité ne soit pas mon truc, la famille Craig nous a gâtés ;-).

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